Le village de Varanne, et l'église dédiée à Sainte Madeleine et Saint Jean.

Au lieu-dit Varanne (parfois appelé Varenne sur certaines cartes) il ne reste aujourd'hui qu'une exploitation agricole et le fronton d'une église ruinée au milieu d'un champ. Qui pourrait croire qu'il y avait jadis un village à cet endroit ? Et pourtant il fut une époque où ce lieu abritait toute une population et même une paroisse. Nous avons d'ailleurs la liste des curés ayant desservi cette paroisse : Jean Bohic 1463-1465, Pierre Bouchier 1498, Jacq. Lemesle (secrétaire de l'évêque) 1518-1519, Jean Rouault (évêque de Rouanne) 1521, Jean Esnault 1558. L'actuel hameau de Rochemenier dépendait de cette paroisse.

Pourquoi un village à cet endroit ? Le mot "Varenne" apporte déjà une partie de la réponse. Ce mot désigne un terrain sablonneux ou alluvial considéré comme fertile, en tout cas idéal pour les paturages, avec peut-être des retenues d'eau pour fair rouir le chanvre. Au dessus du village, vers le nord, le terrain monte rapidement et passe d'une altitude de 53 m à 65 m, où se trouvent de bonnes terres à céréales, non inondables. Il pouvait aussi y avoir des vignes. On peut donc penser que les paysans bénéficiaient d'un environnement favorable, à proximité de la cité de Doué-la-Fontaine réputée pour ses marchés. On peut quand même s'étonner que l'église ait été construite en bas de vallée, dans un lieu humide et menacé d'inondation, alors que le terrain au dessus convenait si bien.

Que s'est-il donc passé en 1567, pendant les guerres de religion, quand, comme il est mentionné dans les écrits, le village et l'église furent détruits par les Huguenots ? Pour quelle raison les mercenaires protestants ont-ils martyrisé ce village ? Représailles ? Appât du butin ? Mais pourquoi ce village aurait-il été plus riche que les autres villages ? Pour l'instant tous ces évènements restent mystérieux. L'église et le village de Varanne ne furent pas reconstruits et la paroisse fut transférée à Rochemenier. La population de Varanne a peut-être émigré dans les carrières souterraines de falun de Rochemenier, transformées à cette occasion en maisons troglodytes. La façade de l'église de Rochemenier ressemble beaucoup à la façade de l'église de Varanne. C'était le style habituel à cette époque-là.

En 1968, le conservateur des Monuments Historiques suggère que les ruines de l'église soient classées. Le 14/8/1968 le conseil municipal de Louresse-Rochemenier officialise cette demande. Voici la description des lieux effectuée par le service des Monuments Historiques :

"Historique : La fondation de l'église est inconnue, mais doit remonter au moins au XIIIème siècle, "Parochia de Varenis 1313 (G732 f.2)". Elle fut ruinée de fond en comble en 1567 par l'armée huguenotte et le service paroissial dût être transféré dans la chapelle voisine du bourg de Rochemenier, dont la paroisse empruntait souvent son nom. Situé sur la voie de Gennes à Doué, le bourg qui entourait l'église a complètement disparu. Il ne subsiste aucune trace de constructions dans les prairies. Le nom de Varanne a été donné au ruisseau voisin qui nait sur Dénézé à la fontaine de Saugré, traverse Dénezé, Louresse, et se jette dans le Douet (le ruisseau venant de la fontaine de Doué).

Description sommaire : Il subsiste de l'église la partie centrale du pignon ouest encadrée de deux contreforts montant jusqu'à la double arcature du clocher-mur. Le couronnement triangulaire a été modifié postérieurement. La porte d'entrée, à double rouleau mouluré, est surmontée d'un gâble aux rampants garnis de choux fleuris et un gâble percé d'un quadrilobe mouluré. D'épais contreforts d'angles sont liaisonnés avec les murs latéraux de la nef détruite, dont il reste les arrachements. Au revers de la façade, des contreforts ont été montés pour épauler le pignon maintenant déséquilibré. Une tradition, signalée par Célestin Port, rapporte que l'allège sculptée en bas-relief, dans le grand fenestrage du château du Pont-de-Varanne (à 200 m de là) et qui représente un groupe de deux personnages portant sur un bâton la grappe de raisin symbolique, aurait appartenu à l'église de Varanne. Ce motif sculpté paraît postérieur aux éléments visibles de l'église."

DATES CLES :

- 1055 (règne de HENRI 1er/capétien) : le château de Varanne est cité dans un acte. On suppose que le village existait déjà.

- 1313 (règne de PHILIPPE IV LE BEL) : première mention de la paroisse de Varanne (parochia de Varenis) trouvée par Célestin Port.

- 1463 (règne de LOUIS XI) : premier curé (Jean BOHIC) mentionné par le Marquis de GEOFFRE (qui ne cite pas ses sources)

- 1567 (règne de CHARLES IX) : destruction de l’église et du village par les Huguenots, pour une raison inconnue. A partir de cette date la chapelle Sainte Emérance de Rochemenier devient l’église paroissiale. Le Marquis de GEOFFRE mentionne les noms de 5 curés de Varanne, le dernier étant Jean ESNAULT nommé en 1558. Etait-il encore en poste lors de la destruction du village en 1567 ?

- 1830 environ (règne de LOUIS-PHILIPPE) : le toit du dolmen de la Pierre Couverte de Saugré (Dénezé-sous-Doué) est tiré sur des rondins de bois par un attelage de 26 bœufs pour faire un pont au gué de Varanne.

- 1848 : construction de la Départementale 69, route qui va de Doué-la-Fontaine à Gennes et qui passe entre Varanne et le Pont de Varanne.

- 1977 : les ruines de l'église de Varanne sont inscrites à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques. Ces ruines appartenaient alors au propriétaire privé de la parcelle agricole.

- 2010 : la commune de Louresse-Rochemenier fait l'acquisition de cette ruine.

- 2011 : travaux de consolidation, subventionnés par la Fondation du Patrimoine.


LE BIEF, près de l'église.

Entre l’église de Varanne et du château du Pont de Varanne il y avait un grand marécage. Lorsque le baron Joseph François FOULLON (1715-1789) voulait aller de son château de Soulanger jusqu’au château du Pont de Varanne il suivait un chemin direct, mais avant d’arriver à destination il fallait contourner le marécage soit à gauche par la ferme de Varanne, soit à droite en rejoignant la route de Doué à Dénezé. On voit sur la carte de la baronnie FOULLON de 1786 que le ruisseau provenant de la fontaine de Saugré (Dénezé-sous-Doué) passait près de l’église. Il y avait plusieurs moulins à eau sur ce ruisseau sur le territoire de Dénezé, mais un seul sur le territoire de Rochemenier. Il s’agit du moulin appelé Moulin Neuf, à 3 km en aval de Varanne, juste avant que le ruisseau se jette dans le Douet (le ruisseau provenant de Doué-la-Fontaine). Ce moulin est mentionné dès 1519. A l’origine le ruisseau devait méandrer dans le marécage de Varanne, puis il a été rectifié, c’est-à-dire rendu rectiligne, pour drainer le marécage et les terres agricoles, et pour approvisionner le moulin en eau (d’où le nom de bief). Plus tard, pour éliminer le surplus d’eau du bief après l’abandon du moulin, un second ruisseau a été créé. Il bifurque depuis le Pont-de-Varanne et coule parallèlement au bief avant de se jeter dans le Douet. Le bief existe toujours. Il est entretenu. Il sert à alimenter en eau les abreuvoirs des maisons d’Ecotiers, et favorise aussi de drainage des terres en période très humide.

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